- Catégorie : Reportages
- Écrit par Jean Mouline
El camino de la percepcion
Lundi 27 février, 19 heures passées, sueurs et tremblements dans une petite rue de Lille : alors que nous buvons un verre pour la parution du numéro 31 du journal La Brique avec nos confrères autogestionnaires, Jack de L’Error franchit la porte. Le visage pâle, les traits tirés, il nous apparaît comme terrorisé, transi, visiblement épuisé. À bout de souffle, il se fraie un chemin au travers du petit monde déjà un tantinet éméché avant de s’écrouler sur un fauteuil. Dans un soupir, il balbutie : « Ils… Ils ont trouvé un vaccin… Un vaccin… »
• Cette déclaration énigmatique nous laisse sur notre faim ; voyant que nous restons bouches bées, il se met alors à répéter frénétiquement, les yeux écarquillés et à deux doigts de l’hystérie : « Ils ont trouvé un vaccin je vous dis ! Un VAC-CIN ! » Martelant ces mots qui restent incompréhensibles pour nous, il s’époumone de nouveau avant de s’évanouir. Penchés sur notre ami inerte, nous restons dans un silence de mort, assurés que quelque chose de terrible vient de s’abattre sur nous, si ce n’est sur la planète entière. Pendant qu’il récupère de ses émotions, nous nous regardons, incrédules. Jack est grand, robuste, énergique, d’un tempérament solide et rationnel, fondateur et guide spirituel de notre École Néogonzo, il est aguerri aux scènes les plus tordues ; pas du genre à trembler comme une feuille et défaillir à la première nouvelle préoccupante. Alors qu’est-ce que ça pouvait bien être que cette histoire de vaccin ? Pourquoi diable une telle alarme ? Un tel choc ? Alors que nous nous interrogeons avec nos camarades rouge et noir, Bruegel s’approche et lui assène une gifle : aucune réaction. Il fouille dans la poche intérieure du manteau de notre ami et en sort sa flasque, habituellement rempli d’un whisky bas de gamme. Stupeur : mise à part une odeur écœurante et sucrée de malt transgénique, elle est vide. « Qu’est-ce qui a bien pu le mettre dans un état pareil ? » s’emporte le Capitaine Cœur-de-Bœuf : « Non mais c’est quoi ce délire ?! » Les minutes passent et alors que nous supputons sur la tragédie en cours, notre bel revient à lui.
« Jack ? Ça va ? Qu’est-ce qui t’arrive ? » Bruegel lui tend un verre d’eau qu’il s’enfile cul-sec : « Ah ! Mais c’est quoi ce truc putain ?! » Il se redresse d’un bond et semble chercher quelque chose. « Il est où mon sac ? » « Sur ton dos Jack. T’es arrivé en furie avant de t’évanouir… Tu vas nous dire ce qui se passe ou merde !? C’est quoi ton histoire de vaccin ? » lui lance Bruegel qui ne le lâche pas. Jack ne répond plus, l’effort de mémoire lui semble pénible, mais surtout il semble déjà ne plus nous écouter. Il sort de son sac un petit format de Label 5 qu’il transverse dans sa flasque métallique. Une fois l’opération terminée il s’enfile une bonne gorgée, se rassoie, et s'allume une blonde. « T’as pas un joint à rouler, Mouline ? On va en avoir besoin. » Bertoni intervient alors, soudainement : « Putain tu vas nous dire ce qu’il se passe ?? Tu débarques ici comme un animal qui chercherait où crever la gueule comme un cadavre à rien savoir dire que de nous balancer des brides de phrases à propos d’une histoire de vaccin comme si t’avais croisé cet enfoiré de Calmette en bas de chez toi avec ses éprouvettes tueuses et une batterie de seringues prêt à t’injecter pire que la mort alors soit tu t’expliques soit tu t’effondres mais là faudrait songer à arrêter tes conneries parce que tout le monde se ronge les sangs et à part te regarder stresser on peut pour l’instant strictement rien foutre à part déplorer ta sale trogne et ton teint blafard ! » Foudroyé par l'éruption verbale de notre ami mangeur de cerveaux, Jack se reprend une rasade et fait tourner son flacon. « T’as raison Bertoni, désolé. Je vous raconte. »
« En consultant des infos sur le net je suis tombé sur un article qui signe la mort du 43 000, de notre école Néogonzo. C’est fini… On est cuit… Ils vont nous faire fermer boutique… On va devoir renvoyer tous les étudiants... C'est la catastrophe, ils ne pourront jamais se réinsérer en plus... Ils ont vraiment gagné ces enfoirés… Rendez-vous compte ! Des scientifiques ont mis au point un vaccin anti-drogues ! AN-TI-DROGUES ! » L’audience reste décontenancée devant cette explication ahurissante. « Euh, excuse-nous Jack si on ne perçoit pas l’importance ou toutes les implications de cette annonce scientifique, mais en quoi est-ce que ça regarde le 43 000 ? Et au-delà, en quoi ça te met dans des états pareils ?? » lâche, pragmatique, une rédactrice de La Brique. « Putain mais vous comprenez rien vous, avec vos « bonjour bonsoir » tout polis et vos dictaphones intégrés ! Comment on va faire NOUS, les enfants du Gonzo, si on peut plus se défoncer la gueule pour partir en reportage ?? Vous croyez qu’il aurait fait quoi Hunter S. Thompson, sans joint, sans champi, sans mescaline, sans peyotl, sans LSD, sans cocaïne, ET POURQUOI PAS SANS ALCOOL aussi ?? On est foutus je vous dis, foutus. Ils vont débarquer chez nous, chez nos amants, chez nos maîtresses, dans nos écoles, dans nos parcs, dans nos bars, sur notre lieu de travail, au Pôle Emploi, à la CAF, à la Sécu, ils vont nous piquer comme des poulets stéroïdés et ce sera la fin de tout ! Ce sera l’apocalypse du Néogonzo ! La bérézina de la perception enchantée ! Le Waterloo de la défonce ! La ruine des voyages intérieurs ! On peut oublier la campagne électorale de 2014 ! Il ne nous restera plus qu’à voir l’horreur du monde comme le reste de la planète : avachi dans l’espoir qu’il change[1]. On aura beau s’enquiller la tête, il n’y aura plus rien de parenthèses dorées ! Plus d'étoiles dans les boues de nos vies de merde ! Plus d’apparition ! Plus de surréalisme ! Plus de mysticisme ! Plus de provocation ! Plus de baston en conférence de presse ! Juste le gris de cette société infernale ! » Emportée par son envolée, il s’écroule dans le fond de son fauteuil et se tait un long moment, grave.
Nous passons le reste de la soirée à discuter des implications de cette découverte scientifique. « La fin des trafics, les mafias qui vont s’écrouler », mais pas seulement. Les États également en pâtiront : en perdant des rentrées substantielles d’argent sale plus d'un gouvernement allait se retrouver dans la merde ! Sans parler des conséquences de devoir assumer publiquement les liens entretenus de longue date avec des cartels, la corruption absolue aux plus hauts niveaux du pouvoir, la responsabilité des armées, l’hypocrisie des luttes anti-drogues mise à nue... Tout cela allait provoquer un chaos sans nom. États-Unis, Canada, Mexique, Colombie, Pérou, Chili, Jamaïque, Maroc, Afghanistan, Chine. Sur tous les continents, ce serait le chaos, et puis la fin de l’hégémonie des dictatures libérales. « L’aboutissement des expériences de chimie de quelques rats de laboratoires va permettre ce que des générations de révolutionnaires avaient jusque-là échoué à réaliser : abattre le système ! » s’exclame d’un coup Jack. « C’est incroyable ! Pour sauver le Néogonzo, il va falloir sauver tous ces salauds de riches et de puissants ! » Cette idée lui était venue, pendant sa méditation éthylique. C’en fut trop pour nos révolutionnaires de camarades de La Brique, qui, excédés, finirent par nous jeter dehors. Dans la rue, Coeur-de-Boeuf, Jack, Bertoni, B2B et moi faisons le serment de ne pas laisser tout cela arriver, d'enrayer la chute de notre civilisation, de sauver notre école. Notre décision est prise : « Nous allons frapper le mal à sa source, coûte que coûte ! »
***
« ‘tain comment c’est abusé ! » Nous n’avons que ces mots à la bouche lorsque Jack et moi débarquons en territoire mexicain, deux jours après notre découverte. « Il est où Esteban, sérieux ? » Notre ami et correspondant guerriero international est sensé nous réceptionner à la sortie de l’aéroport, mais ô surprise, il n'y a personne. Après « dos birras » dans un des bars du hall, nous nous décidons à prendre un taxi afin de poursuivre notre mission. Alors qu‘on s‘apprête à s‘engouffrer dans une des bagnoles, on nous tape sur l’épaule. « Esteban ! Punaise mais tu faisais quoi ? On a cru que tu t’étais fait rançonner ! » Esteban s’en fout, il sourit, tranquille. « Alleeeez pas fâchééés quoi ! » Il nous pousse dans le taxi avancé et indique une adresse au chauffeur : « Dans une heure vous m’en voudrez plus ». Il sort un gros joint d’un paquet de tabac à rouler : « Mexicaine », dit-il tout sourire. Prompt à la dégustation, j'enchaîne : « Laisse tomber compa', on n’a jamais été rancunier. » Esteban nous ramène à sa planque, qu’il occupe avec un médecin mexicain. « Bienvenue, dans ma coloc, enfin, ma « colocacion » comme ils disent ici. » Il rigole. Je commence à me dire qu'il a dû fumer trop de motta mexicaine et qu'il n'a pas pris la mesure du drame. Je sens que Jack commence à fulminer malgré ses yeux rougis. « T’as reçu notre mail ? T’as eu les infos qu’on t’a demandées ? » Jack, lui, est à bout. Et il n’a pas rigolé depuis trois jours. À peine s'il a cillé, quand le Captain, emporté dans une chorégraphie bleue Chimay, a planté ses dents dans un mur de sa piaule la veille de notre départ, laissant à jamais un cratère de placo en guise de trace de son passage sur cette terre.
Esteban nous emmène jusqu'à sa piaule et fait son rapport : « C’est le Nacional Instituto of Psiquiatria qui a mis au point le vaccin. Leurs locaux sont dans le quartier de Tlalpan... Il y a deux entrées, une pour les visiteurs et une pour le personnel. Nous entrerons par la deuxième, le soir c'est plus discret. Les caméras à l’extérieur ne font qu’enregistrer, donc pas d’émissions vers l’intérieur. Quand les flics regarderont les bandes, il sera trop tard et nous serons déjà loin. Faudra bien se couvrir pour ne pas être identifiables. Il y a des fenêtres tout le long du bâtiment, en casser une pour s’introduire dans le bâtiment ne sera pas difficile... Selon nos infos, il n’y a pas d’alarme. Le problème c’est la présence de vigiles qui, dans le meilleur des cas, mangent des tacos en regardant la télé, mais peuvent aussi être pris par une folle envie d’une ballade digestive, et patrouiller, dans l’espoir de déverser leur testostérone... Il faudra avancer prudemment, nous frayer un chemin jusqu’au troisième étage. Nous y trouverons les laboratoires de recherche. Le vaccin est dans un frigo du bureau 4. »Nous prenons tous une profonde respiration : avec ce plan on a nos chances. On peut y croire. Notre destin est là, scellé. « Allez demain action, mais ce soir quand même un peu de détente ! » Esteban nous attire hors de sa chambre, nous avançons dans le salon où est installé son coloc. Il boit du thé, nous en propose. « On a ramassé du « Floripondio » cet après-midi, sur les rives des canaux du Parc écologique de Xochimilco. Vous en voulez ? » Nous nous asseyons. « C'est quoi tu dis ? Du Floripondio ? Joli nom. Ça vient du coin alors ? »
***
À l'avant du taxi, j'ai l'impression que le chauffeur me parle. Ou bien est-ce moi qui lui parle ? Impossible. Je suis au Mexique depuis moins de 24h, et mon « espagnol baccalauréat » remonte à quelques années. Toutes tentatives de discussion seraient vraiment osées. Je crois bien avoir pensé une ou deux choses en matant par la fenêtre... Malgré mon hésitation curieuse en le regardant, genre - tu me parles ou c'est moi qui te parle ? - je constate que ses regards à lui sont très brefs, fuyants, uniquement jetés vers moi en biais. Je me dis qu'il doit vraiment me prendre pour un pauvre touriste. Mais qu'est-ce que j'ai pu faire pour en arriver là ? Je me dis quelque chose le met mal à l'aise. Pour peu, je pourrais le voir suer. Je regarde par la fenêtre, l'air de rien : naturel je me dis. Ça fera peut-être redescendre la pression. Les rues sont comme je n'en ai jamais vues. Ou bien est-ce moi qui n'avais jamais vu ? On tape sur mon épaule. Je me retourne, et m'aperçois que je ne suis pas seul dans le taxi. Soulagement, et incompréhension. Esteban et Jack me font les gros yeux et des signes, synchrones, de la main. Un signe qui va vers le bas, la main est aplatie. Ça, je connais, ça veut dire « calme toi ». Je reconnais ! Mais me calmer ? Merde ? Qu'est-ce que j'ai bien pu faire ? Je ne réponds rien, ayant la sensation d'avoir perdu pied quelque part. Je me sens, décontenancé, extérieur. Je regarde à nouveau devant moi : « tenter de se contenir, tenter de se contenir »,je me répète. J'ai la sensation de rire, mais ne suis pas certain que ce soit mon visage qui bouge ou que ce soit mon rire qui résonne. Serait-il possible que je parle de tout ça à voix haute ? Il me semble bien entendre ma voix à mesure que ma pensée se jonche sur les trottoirs de DF. Serait-il possible que mes pensées m'échappent ?! OH BRIN ?! À quoi je pensais au juste ? Qu'est-ce que j'ai bien pu dire en voyant cette fille toute à l'heure ? S’ils ont entendu tout ce que je pensais... Quelques minutes plus tard je suis dans un bus. Ni Jack ni Esteban ne s'assoient à côté de moi. Je me retrouve dans un siège côté route, une fois de plus. Ça commence à m'exaspérer, la route. Je crois que je vais dormir. Ai-je dit qu'il faisait nuit ? La lune est belle. Elle l'est toujours.
« Mouline! Réveille-toi putain ! » On me secoue. « Faut qu'on descende à cet arrêt ». Je sens qu'on me porte un peu, et quand j'ouvre les yeux c'est pour découvrir les regards des passagers entre encouragement et dédain. Les encouragements doivent être pour mes amis je me dis, en sentant le pathétique pat et tic de la situation. Le car redémarre, nous laissant sur le bord d'une route déserte. Esteban et Jack chuchotent : « Il est toujours perché putain » Comment osent-ils me faire ça ?? Je suis juste là et j'entends tout ! On fume une clope nerveusement, sans plus rien dire. Jack et Esteban repèrent le building qui nous intéresse à une centaine de mètres. Il me semble distinguer de mieux en mieux les éléments qui m'entourent. Le vent me fait du bien. Je suis conscient. Un air chaud caresse mon visage. Mais mon visage avait-il jamais été caressé ? Tout me revient en mémoire. Jack, le vaccin, Mexico, Esteban : sauver le Néogonzo. WE - ARE - ON - A - MISSION ! Nous sommes sur le point d'accomplir un acte fort, un geste qui restera incompris sans doute pour la majorité de la population mais dans lesquels tous les junkies-journalistes de la terre se reconnaîtront. « C'est bon les mecs, ça va, ça va aller. » Jack et Esteban avaient l'air partis pour me laisser derrière, pas question ! « Je ferai ma part je vous dis ! Merde c'est bon j'en ai vu d'autres quoi ! » Ils n'ont pas l'air convaincu, ils me fixent dans les yeux chacun leur tour en soutenant mon regard. Finalement Jack tranche : « Allez on y va, mais putain déconne plus Mouline ! » On ménopuchka et on prend la route vers le Nacional Instituto of Psiquiatria. Nous allons détruire ce satané vaccin, pour que vive la presse ivre. Je tremble.
Esteban casse la vitre, comme un pro. On dirait que le verre se dépose comme de la neige sur le sol. Nous pénétrons le bâtiment. Jack s'engouffre le premier, puis Esteban. On dirait que le mur les avale, dans un trou qui semble être maintenant la bouche d'un fantôme. Ses fenêtres me fixent. J'hésite, puis me livre à mon tour au monstre. La cavité est froide. Du carrelage. Sa langue sur laquelle je me couche presque, me parcoure. Je frissonne. Esteban et Jack allument des lampes torches pour avancer sans encombre. Ils ont repéré une porte qui mène vers le couloir. Elle n'est pas verrouillée. Nous sommes dans ce qui ressemble à un laboratoire de classe de chimie. Des lavabos, des bec-benzens, quelques chaises, un tableau noir. J'ai pas vu ça depuis des années. « Schuuut ! » Leurs yeux sont écarquillés et me fixent. Serait-ce possible que j'ai parlé à voix haute de nouveau ? Je mords mes lèvres, plein de regrets. Trop tard sans doute. En voulant me tasser dans un coin sombre, je fais basculer dans le vide un pack d'éprouvettes en verre. Pas le temps de réagir que la chute au sol fait un vacarme du tonnerre. Maudite gravité ! Encore un coup des scientifiques ! À peine le temps de sentir les regards coupables de mes compagnons qu'une voix nous rappelle que nous allons tous subir le même sort, un sort potentiellement douloureux : « Heey ! He oido algooo ! Quiiiien esta aquiii ?! » La voix du vigile est lourde, elle ne peut pas correspondre au physique d'un gringalet quelconque que nous pourrions défoncer à trois contre un, ça paraît évident tout de suite. À peine le temps de se retourner vers la fenêtre pour nous enfuir qu'un pied - que dis-je ! - une montagne, défonce la porte - même pas verrouillée – pour nous faire face. « Puuuuuuta maaadre cabrooooon ! » Il rugit. « Que estaan haciiiiendo aquiiii ?! » Une autre montagne rejoint la première, et en un instant c'est tout l’Himalaya qui déferle sur nous. « Griiiiingos de miiiieeerda ! » L'électricité des tazers nous paralyse instantanément, coupant court à toute possibilité de fuite. J'entends Jack hurler : « Somos rournalistos ! Somos rournalistos ! » Les gaz que les brutes déversent dans nos yeux à bout portant nous brûlent tout le visage jusque dans la bouche et les poumons.Nos yeux sont comme des boules de chairs en pleurs. Les coups nous rompent. J'entends encore « Somos rournalistos ! » et puis plus rien. Esteban ne bouge plus, une ruse pour « moins encaisser » je me dis. Je vais faire pareil. À travers la fenêtre la lune apparaît. Je me souviens : Frida... La percepcion se busca en los ojos de la tierra, en el corazon de las aguas, en la bocca de los hanguos, se encontra caminando la selva, nadando los nubes, en el vientre del sol. •
[1] « Le changement c'est maintenant ».