Communiqué de M. de L’Error, directeur de l’ENL : « J’ai décidé d’organiser un plébiscite »

• Chers élèves,

Voilà aujourd’hui près de deux mois que je ne me suis pas exprimé publiquement, laissant nécessairement notre prestigieuse école dans le chaos que vous avez, que nous avons traversé cet été. En cause, une bande de beatniks chevronnés – en fait trois élèves bien connus de toutes et tous, bientôt rejoints par un quatrième traître parodiant le nom d’un célèbre résistant – qui s’est autoproclamée « commune libre de l’ENL » (sic) lors d’un simulacre médiatico-terroriste des plus grotesques. Leur revendication, similaire à celle que l’on peut entendre dans un foyer de lycéens, tenait en un mot : démission.  Ma démission. Mais encore ? Eh bien, la seule et unique mesure « révolutionnaire » qu’ils ont osé prendre après leur pseudo-putsch a été un… « harlem shake » monstrueux conduisant à la destruction et au vandalisme abject.

Aussi pendant deux mois ai-je préféré me retirer, ne pas m’interposer, pour donner à voir, en quelque sorte au monde entier, ce que leur fanatisme pouvait perpétrer. Le  crime, le vice : le désordre. Je sais ce que vous avez pu ressentir en mon absence, camarades, combien d’épreuves vous avez dû endurer et surtout combien d’humiliations vous avez subies. Vous m’en voudrez peut-être de vous avoir abandonnés, ce que je comprendrais parfaitement. Mais je ne pouvais agir autrement : le beatno-fascisme ne montre son vrai visage que quand il croit à sa victoire. Et tout le monde, hélas, a pu s’en rendre compte : Esteban, Bruegel de Bois et Simon de Bavoir sont complètement tarés.

Ceci dit, en réalité je ne m’étais pas totalement retiré. J’avais entrepris de les débusquer et il vaut mieux rester discret si l’on veut que sa proie fasse une erreur stratégique. J’ai donc retrouvé les rebelles et, comme vous le verrez dans ce brillant vidéo-reportage-gonzo réalisé par certains des meilleurs élèves loyalistes de l’école, je suis allé à leur rencontre le 16 août 2014, jour de l’ultimatum qu’ils avaient fixé.

En toute logique, ça aurait pu très mal se passer – j’étais armé et je ne suis pas du genre à trembler. Mais ça n’a pas été nécessaire, en fait je n’ai même pas eu à les tabasser. Quand je suis arrivé dans leur planque, au moins 350 personnes y faisaient la fête, toutes plus bourrées les unes que les autres – spectacle pitoyable, je dois dire. Quant à Esteban, De Bavoir et De Bois, ils étaient tellement déchirés qu’ils ne m’ont tout simplement pas reconnu. Hé, que pouvais-je faire ? Ils étaient dans un état si lamentable – Esteban s’était teint en blond et courrait en boxer au milieu d’un champ en criant « Wesh la munne-co ! », Bruegel avait des dreadlocks, puait, surtout parce qu’il dégueulait des litres infâmes de bile et De Bavoir, lui, s’était déguisé en député du tiers état genre Robespierre et creusait des trous dans la terre avec une tronçonneuse – que mon intervention n’aurait servi à rien. Au fond, me suis-je dit, autant les laisser faire leur merde et reprendre le pouvoir fermement. C’est bien ce qu’attendaient les Français fin mai 1968, et sans doute ce que vous attendez, vous aussi, camarades.

C’est pour cette raison, mes amis, que, pour finir de remettre de l’ordre une bonne fois pour toutes à l’ENL, et cela en toute légitimité, j’ai pris la décision de me tourner vers vous en organisant un plébiscite. Oui, vous avez bien lu, un référendum sollicitant votre avis sur le projet que je veux vous proposer aujourd’hui, un projet qui me tient à cœur depuis longtemps : faire un journal de l’ENL, autrement dit une version papier du 43000. Ce projet, s’il aboutit, représentera un tournant majeur de l’école et propulsera chacun d’entre vous au sommet de la gloire journalistique. Sachez-le.

Dans un mois, vous serez donc amenés à vous prononcer pour répondre à la question : « Approuvez-vous la création d’un journal Lille43000 ? » Naturellement, si je n’obtiens pas votre approbation, j’assumerais  pleinement la responsabilité de cet échec en me retirant de la direction de l’école.

D’ici là, croyez en mon entier dévouement pour la cause de la grandeur de l’École Néogonzo de Lille ! •

Jack de L’Error